mercredi 16 décembre 2015

« L'Enquête » de Philippe Claudel

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C’est un livre intéressant sans le pouvoir de vraiment toucher le lecteur. Les événements sont un peu trop absurdes et irréels pour donner une histoire vraiment captivante.  Le protagoniste, « l’Enquêteur », est un individu qui semble un peu désincarné. Il doit examiner une série de suicides dans une grande entreprise ou « l’Entreprise ». Nous suivrons les événements pendant son séjour dans un hôtel étrange et pendant sa visite à cette Entreprise. C’est l’enquêteur qui raconte l’histoire. Il endure des incidents étranges et désagréables.

L’histoire est vraiment intemporelle mais elle se déroule dans l’actualité, car on parle de télévisions et de portables. Nous nous trouvons dans une société régularisée rigidement dans une quelconque ville qui est dominée par cette grande Entreprise qui est vraiment omniprésente.  Tous les personnages dans le livre sont des fonctionnaires froids et impersonnels. Ils représentent surtout des symboles plutôt que des gens réels avec des émotions et des sentiments humains. Les personnages dans le livre ne portent pas des noms propres, mais ils s’appellent après leurs fonctions : L’Enquêteur, Le Policier, Le Guide, Le Veilleur, et, mon étiquette préférée, Le Responsable.

Chaque personnage, chaque fonctionnaire, a sa petite tâche soigneusement délimitée. L’auteur décrit une société qui est devenue une bureaucratie idéale. On croyait lire une histoire de Kafka ! On ne rencontre pas des gens normaux dans ce livre, on ne trouve pas des individus humains non plus. Le public, les gens dans les rues, ils promènent et roulent tous dans la même direction, littéralement. C’est impossible pour un individu comme l’Enquêteur de trouver sa propre voie.

C’est un livre vraiment intéressant qui traite quelques thèmes distincts mais fortement reliés. Il y a par exemple l’aliénation d’un individu dans une société impersonnelle, mais aussi la lutte d’un individu contre les autorités dans une société totalitaire. C’est une histoire simple avec des événements plutôt absurdes que réalistes. Le livre donne une ambiance menaçante mais toutes les situations sont tellement irréelles que le lecteur peut se distancier facilement de l’histoire. En effet, c’est difficile de s’identifier avec le protagoniste. Il est aussi surtout un fonctionnaire, mais un fonctionnaire qui montre quelques doutes et quelques sentiments humains et normaux.

Je n’aime pas vraiment la fin du livre. Dans les derniers chapitres, l’Enquêteur s’est confronté avec quelques vérités sur sa propre situation par, bien sûr, « Le Psychologue ». Bien que ça aide un peu à éclaircir la situation pour le lecteur, pour moi la fin du livre manque quelque chose, car l’histoire ne se termine pas vraiment.  

On peut trouver quelques similarités entre « l’Enquêteur » et « le Rapport de Brodeck », cet autre livre de Philippe Claudel. Les deux livres présentent des histoires étouffantes sur des individus déracinés qui ont dû accomplir une quelconque mission dans un environnement étrange et inquiétant. Tous les deux protagonistes se trouvent dans une situation qui se détériore tout au long de l’histoire. Cependant, je trouve que « L’Enquêteur » n’offre pas du tout cette même ambiance angoissante et captivante. Je crois que je vais l’oublier rapidement, contrairement à « Le Rapport de Brodeck ».