mercredi 22 février 2017

L’horticulture en serre aux Pays-Bas, sera-t-elle un peu plus durable ?

Mondialement, après les États-Unis, les Pays-Bas sont le deuxième exportateur des produits agricoles. La production des fleurs et des légumes par le secteur de l’horticulture en serre contribue considérablement à cette exportation. C’est un secteur rentable qui offre beaucoup d’emplois. C’est aussi un secteur polluant avec de grands impacts environnementaux. Il génère des eaux usées très polluées par des fertilisants minéraux, des pesticides et des herbicides. La nuit, les serres causent une pollution lumineuse considérable. Plus important, les serres sont de grands consommateurs d’énergie. On utilise beaucoup d’électricité pour l’éclairage, on consomme de grandes quantités de gaz naturel pour le chauffage et, forcé, on produit de grandes quantités de dioxyde de carbone.

Les émissions de CO2 du secteur s'élèvent à 5,7 mégatonnes en 2014. C’est déjà une diminution de 19% en comparaison de 1990. En effet, le secteur a déjà achevé son objectif d’émissions pour 2020 de 6 mégatonnes CO2. Cette réduction a surtout été réalisée par une diminution de la superficie de serres, par l’occurrence des hivers très doux et, pour une petite partie, par l’utilisation de l’énergie géothermie (Velden et Smit, 2014).

On observe maintenant une progression lente de l’utilisation de l’énergie géothermie aux Pays-Bas. La production d’énergie et le nombre d’installations s’agrandissent (Figure 1), bien que, aujourd’hui, on ne compte que 15 installations de géothermie. Pourtant, en 2015, ce modeste nombre d’installations a produit 2,4 petajoule d’énergie, a épargné environ 77 millions mètre cube gaz naturel et a évité l’émission de 138 000 tonnes CO2 (EZ, 2016). Le potentiel total technique et économique de l’énergie géothermique aux Pays-Bas est 850 petajoules par an (Kramers L. et al, 2012). Plus importante, dans l'intervalle, on a accordé déjà beaucoup plus d’autorisations pour explorer nouvelles locations pour utiliser l’énergie géothermique (Figure 2).

Figure 1. La production de la chaleur par géothermie (TJ par an, à gauche) et le nombre d’installations de production (à droite) aux Pays-Bas (Source : EZ 2016)

Malgré les grands avantages de l’énergie géothermique, les entrepreneurs la traitent encore avec circonspection. La raison de cette prudence est simple, le changement de la source d’énergie pose des risques. D’abord, il y a un risque financier. Le coût d’investissement est élevé, on parle de sept jusqu’à quinze millions d’euros. Pour un horticulteur en serre, ça signifie un ou deux fois le chiffre d’affaires annuel. D’ailleurs, les chiffres financiers sont difficiles à obtenir.

Ensuite, il y a un risque lié au travail administratif. Un projet géothermique exige beaucoup d’autorisations aux Pays-Bas : pour la détection de la ressource, pour l’exploitation minière et pour faire des forages. Ensuite, on a besoin d’un permis de la sécurité de la location (du forage) et un permis pour construire une centrale d’énergie. Finalement, on doit obtenir deux permis locaux, un permis d’exploitation et un permis d’environnement. Les procédures pourraient prendre des mois ou même des années, sans avoir une quelconque garantie de les obtenir effectivement.

Finalement, il y a des risques techniques. Malgré toutes les explorations antérieures et coûteuses, le forage peut échouer quand même. Il y a aussi un risque que les nappes ne sont pas connectées, ce qui pourrait réduire considérablement la vie technique du projet. Finalement, il y a un risque qu’on pompe non seulement d’eaux, mais aussi du gaz ou du pétrole, ce qui compliquerait le projet.

Figure 2. Les autorisations accordés (vert) et sollicités (vert rayé) pour l’exploration, et les autorisations accordés (rose) et sollicités (rose rayé) pour l’exploitation de l’énergie géothermique aux Pays-Bas (Source : EZ 2016)

Pourtant, les horticulteurs se tournent de plus en plus à cette source d’énergie pour le chauffage.  Par exemple, en 2015, neuf grands horticulteurs à Vierpolders, un petit village aux Pays-Bas, ont ensemble mis en œuvre un projet géothermique. L’objectif visait à réduire la quantité des ressources utilisées et les impacts environnementaux. Le projet consiste en la construction d’un circuit fermé pour le pompage et distribution de l’eau géothermique. On pompe l’eau à un débit de 300 mètres cubes par heure d’une profondeur d’environ 2 200 mètres. On peut chauffer presque 50 hectares de l’horticulture en serre avec des eaux souterraines à 82 degrés centigrades.

Le projet a deux dimensions innovantes. La première, c’est le changement à l’utilisation d’une source d’énergie gratuite, quasi infinie et sans impacts environnementaux. La deuxième dimension innovante, c’est l’échelle industrielle à laquelle le projet a été accompli. En effet, c’était la première fois qu’un tel grand groupe d’horticulteurs a coopéré. Les résultats du projet à Vierpolders sont encourageants : on épargne environ 14 millions mètres cubes du gaz naturel par an et on réduit les émissions de dioxyde de carbone par 25 millions kilos par an. On ne peut qu’espérer que ces bons résultats persuaderont autres horticulteurs de changer leur source d’énergie aussi, car il reste environ 4 400 qui utilisent encore le gaz naturel.

Le remplacement du gaz naturel par l’énergie géothermique, c’est une solution pertinente en regard d’une industrie plus durable. C’est aussi une solution pour l’économie de demain, car les économies seront réalisées chaque année dans l’avenir. Le coût de la technologie utilisé dans ces projets de remplacement va diminuer dans l’avenir, alors les résultats économiques de pareils projets peuvent seulement améliorer.

Alors, il est vrai qu’on peut améliorer la durabilité du secteur de l’horticulture par le changement à l’énergie géothermique, mais cette durabilité reste quand même un peu limitée, à cause de tous ses autres problèmes environnementaux qui sont encore à résoudre.

Réferences

EZ (2016), Aardwarmte in Nederland, Jaarverslag 2015, Ministerie van Economische Zaken, Den Haag, 2016 (lien)

Kramers L. et al (2012), Direct heat resource assessment and subsurface information systems for geothermal aquifers; the Dutch perspective, Netherlands Journal of Geosciences, 91(4), p. 637-49. (lien)

Velden, van der N. en P. Smit (2015), Energiemonitor van de Nederlandse glastuinbouw 2014, Rapport van de Universiteit Wageningen (lien)


Ce texte a été produit dans le cadre de cours « Développement Durable » ; la rédaction d’un article de 6500 signes maximum (titres, notes, signatures, espaces compris) qui doit porter sur un enjeu du développement durable.

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