Au début de 2017, je me suis inscrit à Coursera pour le cours « Gestion et Politique de l'eau » qui consiste en cinq modules.
Les politiques publiques sont les règles qu’on impose aux usagers et acteurs pour éviter la surexploitation de la ressource et pour interdire le comportement non-permis. Cependant, les acteurs, ils tentent à contourner ces règles voire à les amender et compléter avec le temps.
Voilà, le résumé du deuxième module.
Les politiques publiques sont les règles qu’on impose aux usagers et acteurs pour éviter la surexploitation de la ressource et pour interdire le comportement non-permis. Cependant, les acteurs, ils tentent à contourner ces règles voire à les amender et compléter avec le temps.
Voilà, le résumé du deuxième module.
Module 2 Les règles de la ressource, leurs usages et leur contournement
Le module introduira d’abord le « régime institutionnel de ressources de l’eau ». Ensuite, on discutera et comparera le développement de ces régimes institutionnels en Suisse et en Europe. On présentera aussi la directive cadre européenne sur l’eau. Après, on exposera un cadre d’analyse pour comprendre le processus de la mise en œuvre des politiques publiques. Finalement, on présentera une étude de cas sur la protection de l'écosystème aquatique en Valais (Suisse).Les régimes institutionnels de ressources
Pour bien comprendre l'usage qui est fait d'une ressource, il faut identifier les usagers, les biens et services qui en sont tirés et le corpus de règles qui l'encadre. Le cadre des régimes institutionnels de ressources (RIR) sert à comprendre comment les usagers d’une ressource se coordonnent. On présuppose qu'il y a une relation directe de causalité entre la réglementation et le comportement des usagers.Les régimes institutionnels de ressource sont définis par l'ensemble des règles en vigueur (les lois qui sont effectivement appliquées ou à disposition). On peut distinguer quatre catégories de règles : 1) le droit public (les politiques publiques) ; 2) les droits de propriétés, 3) les droits de disposition (des concessions de très longue durée) et 4) les droits d’usage (par exemple, un certain quota de poissons pour la pêche ou la navigation sur une certaine portion du fleuve).
Les politiques publiques sont l'ensemble des lois qui encadrent la majorité des comportements à l'égard de la ressource. Les règles sont appliquées par le droit public et par les politiques de l'environnement. Elles autorisent à faire usage de la ressource et elles définissent ce qui est le comportement admissible (elles autorisent à polluer la ressource, à la prélever ou encore à l'exploiter). Les droits de propriété sont différents des politiques publiques car ils s'inscrivent dans un corpus de droit privé. Ils sont opposables et respectés et garantis par la constitution. Ils permettent aussi d'exclure l'usage à d'autres usagers non-propriétaires
Le cadre théorique des régimes institutionnels consiste en quatre types de régulation. La régulation par :
- les politiques publiques sans impact sur les droits des propriétés. Elle contraint tous les usagers (propriétaires ou non), d'adopter un comportement égal vis-à-vis de la ressource.
- les politiques publiques qui limitent les droits des propriétés (par exemple par l’interdiction d’arrosage en cas de sécheresse).
- la redéfinition des droits des propriétés par définir dans quel contexte le propriétaire peut faire usage de la ressource (réviser, renégocier ou réduire la durée d’une concession).
- la relocation des droits de propriété (la nationalisation ou la privatisation de la ressource).
Quatre types de régulation |
Les règles en usage sont toutes les règles vraiment appliquées, contournées ou dévoyées, ou utilisées pour des autres fonctions, bref, l’arrangement des régulations. Cet arrangement contraste avec les règles en vigueur du régime institutionnel. Ils ne sont pas forcément inclus dans le cadre légal des politiques publiques ni dans le corpus de droit privé de droit de propriétés. Cependant, elles peuvent expliquer le comportement, qu'il soit positif ou négatif, des usagers.
La gestion de l’eau en Suisse
Il y a eu cinq phases dans le régime institutionnel de ressources de l'eau en Suisse. À partir de 1975 on a introduit trois politiques publiques, indépendantes les unes des autres : la protection contre les eaux, la régulation des usages économiques de l'eau et la protection même de la ressource. L'articulation entre ces trois politiques publiques sera une des principales sources de manque de cohérence de l'ensemble du régime institutionnel jusqu'à aujourd'hui. La Loi sur l’eau de 1991 produit une étendue et une cohérence beaucoup plus fortes, aussi grâce à l'instauration du principe pollueur-payeur en 1995.Évolution du RIR Suisse (5 phases) |
Aujourd’hui, c’est la cinquième phase de gestion de l’eau en Suisse, la phase de recherche d'intégration. Il y a toujours des problèmes en termes de cohérence et d'intégration de l'ensemble du régime. Les problèmes de cohérence sont essentiellement dus à des chevauchements entre les politiques publiques sectorielles. C’est pour ça qu’on a besoin des mécanismes, notamment à travers la gestion intégrée des ressources, qui permettent de mieux les articuler entre elles.
La directive cadre européenne sur l’eau
Il y a eu trois phases dans le régime institutionnel de ressources de l'eau dans l'Union européenne. Elles ont permis d'aller de l'harmonisation des lois nationales à la recherche de la cohérence du régime. La directive cadre européenne, promulguée en 2000, est la règle structurante d’aujourd’hui pour la gestion de l’eau. L'objectif essentiel est de coordonner à la fois la durabilité et l'efficience économique. La régulation de l'eau n’est plus uniquement sectorielle, mais elle est liée avec les réglementations sur la concurrence et celles sur les marchés publics.Evolution du RIR européen (3 phases) |
La directive cadre européenne se base sur sept principes : 1) l'eau n'est pas un bien marchand ; 2) la durabilité ; 3) la gestion à la fois de la quantité et de la qualité ; 4) le principe du pollueur-payeur, 5) l'eau paie l'eau (l'ensemble de l'argent drainé par le secteur doit financer le secteur) ; 6) le bassin versant et 7) la participation (de plus en plus d'usagers vont jouer un rôle dans la gouvernance de l'eau).
On reste encore dans un régime complexe avec des problèmes d'intégration. La régulation de ces problèmes d'harmonisation et de cohérence sont dus à des politiques publiques qui ne sont pas forcément en accord avec les droits de propriété et avec le principe de subsidiarité. Il y a donc un décalage entre les règles telles qu'elles sont pensées au niveau communautaire et telles qu'elles vont être appliquées sur le terrain.
Il y a deux grands volets dans la régulation de l'eau dans l'Union européenne : la croissance économique d'une part (organisationnel) et la qualité environnementale et la durabilité d'autre part (environnemental). Le volet organisationnel vise l'efficience de la gouvernance. Ses objectifs s'articulent autour de trois mécanismes principaux, la privatisation, la libéralisation et la rationalisation (améliorer la gouvernance avec plus de transparence, plus d'efficacité) de la commande publique. L'objectif principal du volet environnemental est le développement soutenable et la soutenabilité (la protection et la préservation de la ressource et sa soutenabilité).
Une théorie sur la mise en œuvre
L'inscription d'une règle au sein du régime institutionnel ne constitue une fin en soi. Il faut que les acteurs réapproprient la règle, la traduisent en prescriptions qui s'imposent au niveau concret de l'action. Les règles institutionnelles se matérialisent sur le terrain par des outputs (les actes concrets de mise en œuvre de ces politiques publiques), des impacts (les changements au sein du comportement des acteurs) et outcomes (la réalité concrète).En réalité, il y a un écart entre ce qui est prévu au sein du régime institutionnel et ce qui se passe concrètement sur le terrain. Il y a une boîte noire qu'il s'agit de comprendre les mécanismes qui se produisent entre la règle et sa matérialisation sur le terrain ; des mécanismes sociaux complexes, des processus politiques au sein desquels les acteurs vont intervenir, se réapproprier les règles, pour les traduire en prescriptions concrètes au niveau de leur action.
On peut formuler l'hypothèse centrale du cadre d'analyse des régimes institutionnels de ressources comme « plus le régime institutionnel est étendu et cohérent, plus les conditions d'exploitation de la ressource seront durables ». Cependant, l’utilisation d’une description du contenu du régime institutionnel pour expliquer la réalité de ce qui se passe sur le terrain, c’est problématique. On ne peut pas regarder les variables intermédiaires entre ce régime institutionnel, ses règles, et les outputs, les impacts et « les outcomes » sur le terrain. De plus, on ne peut pas comprendre ce que les acteurs font effectivement par seulement décrire la règle qui régule ce le comportement.
Il est donc nécessaire d'ouvrir « la boîte noire » de la mise en œuvre pour pénétrer ces processus de mise en œuvre et pour comprendre les processus politiques, à travers lesquels les règles se matérialisent sur le terrain. Ce cadre d'analyse, ce sont les études de la mise en œuvre qui en ont fait précisément leur objectif.
La boîte noire entre règles et leur outputs, impacts |
Ouverture de la boîte noire : le cadre d’analyse (les jeux d’acteurs)
Le cadre d'analyse se construit autour de quatre points majeurs :- Le point de départ de l'analyse : le problème socialement construit et territorialement ancré au niveau local (la perspective du bas vers le haut) ;
- Le régime institutionnel structurant : Les règles constituent le contexte structurant de l'action des acteurs. Ils ne constituent plus le point de départ de l'action). Les règles ne sont plus seulement des contraintes qui s'imposent aux acteurs mais aussi des opportunités pour eux d'atteindre leurs objectifs ;
- La métaphore des jeux d'acteurs : La boîte noire de processus sociaux autour de la configuration d'acteurs, les relations de pouvoir, et les stratégies d'activation du droit. Les acteurs sélectionnent la règle qui leur paraît le plus adéquate pour atteindre leurs objectifs. Ils utilisent des stratégies différentes. La stratégie de la passivité (peut être imposée par des circonstances externes à la volonté des acteurs) ; de la concrétisation (appliquer une règle au plus près de sa formulation avec une certaine marge de manœuvre) ; du détournement (activer une règle non pas pour atteindre les objectifs pour lesquels elle a été adoptée, mais pour atteindre des objectifs qui lui sont propres) ; du contournement (résister à l'application d'une règle : sans conséquences ou par confrontation quand on va dans le sens contraire) et de l'innovation (chercher à aller plus loin que ce que prévoit le régime institutionnel) ;
- La notion d'arrangement de régulation localisé (ARL) : tous les arrangements entre acteurs vont soit améliorer l'étendue et la cohérence du régime institutionnel (innovation), soit la diminuer ou la remettre en question sur le terrain (contournement ou détournement).
L'arrangements de régulation localisé |
L’étude de cas : protection de l'écosystème aquatique en Valais (Suisse)
Les usages principaux (agricole, eau potable, hydro-électricité) dans en Valais créent un risque pour la qualité de l'écosystème aquatique. Les différents services poursuivent tous un intérêt public légitime : la production d'énergie, l'agriculture, la protection de l'environnement. Alors, on doit trancher entre ces différents intérêts. Les acteurs, dans ces processus d'arbitrage, ne sont pas des sujets passifs ; ils sont au contraire des parties prenantes. Ils cherchent à appliquer le droit de la manière qui les arrange le plus. La politique de protection des eaux joue un rôle structurant, mais chacun des acteurs va essayer de l'interpréter de la manière qui est la plus conforme à ses intérêts.La coalition Environnement concrétise les règles issues de la loi sur la protection des eaux et met en place des mesures d'assainissement ambitieuses qui respectent la loi. La coalition d’Énergie suit la stratégie de la concrétisation a minima (par mettre en place un certain nombre de mesures qui ne changent pas la situation sur le terrain). La coalition Agricole suit la stratégie de contournement par la confrontation. Bien que les prélèvements pour l'irrigation devraient également être soumis aux mesures d'assainissement, elle avance que ces prélèvements sont protégés par des droits immémoriaux.
L’interaction d'acteurs et leurs stratégies expliquent les différents arrangements qui ont été mis en place sur le terrain. Cet arrangement de régulation localisé consiste en une série d'activités administratives : un plan d'assainissement, une série de décisions intermédiaires, des études de faisabilité par bassin versant pour assainir les différents cours d'eau, et même des décisions finales qui enjoignaient certains concessionnaires hydroélectriques à mettre en place certaines mesures.
L'étude de cas : les acteurs, leurs stratégies et l'arrangement de régulation localisé |
Conclusion
Les régimes institutionnels des ressources s'étoffent avec le temps par augmentation de l'étendue et la cohérence des règles. Cependant, pour une même ressource en eau il y a plusieurs lois et politiques publiques. Alors, un même fleuve relève de différentes règles institutionnelles qui elles-mêmes sont fondées dans des secteurs de politiques publiques extrêmement variés. La question est comment on va les mettre en cohérence pour éviter des oppositions, des tensions et des contradictions entre ces règles. La question de la cohérence touche à quelques autres problèmes : l'interdépendance sectorielle et de l'intégration de la gestion des ressources en eau.Le prochain module traitera la gestion intégrée des ressources en eau.
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